Belgique
Score 40
Aperçu de l'Observateur des droits sociaux
Face aux différents défis sociétaux qui se posent à elle, la Belgique a fait de grands progrès, notamment dans le domaine du logement, de la santé et de la lutte contre la pauvreté, signale le GSN, piloté par Pour la Solidarité es efforts mis en place pour accueillir les réfugié·e·s ukrainien·ne·s suite à l’invasion de leur pays par la Russie en 2022 ont témoigné de l'efficacité des approches axées sur la communauté à Bruxelles, mais les mesures d’inclusion restent limitées et ne s’étendent pas aux personnes migrantes non européennes. Le pays est aux prises avec des disparités persistantes en matière d’emploi, qui touchent particulièrement les femmes migrantes et les minorités, malgré des réformes récentes qui visaient à améliorer l'accès au marché du travail. Le logement reste un enjeu critique : les listes d’attente pour obtenir un logement social sont longues, ce qui exacerbe les inégalités. En outre, la Belgique fait constamment face à des obstacles pour garantir un accès équitable à la santé et mettre fin à la précarité énergétique en pleine hausse des coûts.

Score 40
Égalité des chances et accès au marché du travail
Inclusion des migrants, des réfugiés, des demandeurs d'asile, des minorités et des groupes vulnérables
L'inclusion des personnes migrantes et demandeuses d’asile est une question qui suscite de grands débats en Belgique et pour laquelle continuent de se poser de nombreux défis, notamment avec les arrivées en provenance de l’extérieur de l’Europe. Des progrès ont été faits dans les domaines présentés dans le Programme national de réforme[1] Tout d'abord, en vue de faire face à l’afflux des réfugié·e·s d’Ukraine après l'invasion du pays par la Russie en 2022, plusieurs groupes de travail ont été mis en place à Bruxelles, pour se concentrer sur les domaines tels que le logement, l’insertion sur le marché du travail, la santé et la protection sociale. Un ou une membre de la communauté ukrainienne se trouve au sein de chaque groupe, afin d'assurer un lien direct avec les personnes réfugiées. Le Comité des voix ukrainiennes réfugiées, appuyé par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCNUR), a mis sur pied un centre communautaire qui s’occupe de plus de 250 Ukrainiens et Ukrainiennes. En janvier 2023, près de 10 700 Ukrainiens et Ukrainiennes ont été enregistré·e·s dans la région de Bruxelles. Un programme d’hébergement/d’accueil impliquant des citoyen·ne·s à titre privé et des municipalités de la région, a permis de loger tou·te·s les réfugié·e·s, et 2 420 personnes ont bénéficié d’initiatives d’insertion et de formation professionnelles. Toutefois, ces mesures positives concernent principalement les personnes migrantes européennes - c’est-à-dire Ukrainiennes - et n'ont pas été élargies aux groupes de personnes migrantes provenant de pays extérieurs à l’Europe.
Plusieurs mesures ont été prises en 2023 en vue de promouvoir l'inclusion de toutes les personnes migrantes sur le marché du travail et dans la société en général. Ces mesures comprenaient notamment un projet d’ordonnance sur les migrations économiques pour simplifier les permis de travail et les cartes professionnelles pour les travailleurs et travailleuses non-européen·ne·s. Le secteur public a été encouragé à développer des filières d’emploi pour les jeunes sans-emploi qui ne suivent ni études ni formation (NEET, « Not in Education, Employment, or Training »), en particulier ceux et celles étant peu qualifié·e·s, et les personnes migrantes. Toutefois, les disparités demeurent, en particulier pour les femmes nées hors de l’UE. Le plan national belge pour la reprise et la résilience (PRR) comprend des réformes pour multiplier les tests de discrimination et appuyer les politiques sectorielles anti-discriminations, en particulier en Flandre [2]Néanmoins, les experts et expertes de la société civile soutiennent qu’il ne s’agit là que de mesures à court terme et soulignent le besoin de projets sur le long terme et de financements structurels pour aborder efficacement l’inclusion des personnes migrantes et des demandeurs et demandeuses d'asile.
Plusieurs facteurs empêchent la bonne inclusion des populations vulnérables. L’agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d'asile (Fedasil) est dépassée par le nombre croissant de cas qu’il lui faut examiner, et son manque de ressource entrave sa capacité à répondre de façon adéquate aux besoins des personnes migrantes[3] [4] Par exemple, un budget insuffisant pour offrir un accueil adéquat a pour résultat une charge de travail croissante et des conditions de travail déplorables [5]Le manque de lieux d’accueil est un problème majeur, en particulier à Bruxelles ; les conditions de vie des personnes migrantes deviennent alors de plus en plus précaires, avec un accès limité aux soins médicaux, compromettant par-là leur accès aux droits fondamentaux.
L'insertion sur le marché du travail est également un problème, en particulier pour les femmes migrantes dont la surqualification vient s’ajouter aux obstacles qu'elles rencontrent. Une analyse de 35 articles universitaires rédigés par des chercheurs et chercheuses belges montre les défis persistants de l'intégration des personnes migrantes sur le marché du travail. Même lorsqu’elles sont en situation d’emploi, les personnes immigrées de première génération s'en tirent toujours moins bien que les Belges de naissance, et les enfants né·e·s en Belgique de parents immigré·e·s font également face à des difficultés malgré leur éducation locale[6] Les communautés turques, marocaines, d’Europe du sud, subsahariennes et autres sont plus susceptibles que la moyenne d’avoir un emploi d’ouvrier ou d’ouvrière. La ségrégation ethnique du marché du travail crée des barrières à l’accès à des emplois de qualité et met en évidence le besoin de promouvoir une plus grande égalité des chances sur le marché du travail. [7]
La situation des personnes migrantes, en particulier les hommes seuls, est exacerbée par le manque de volonté politique, les ressources inadéquates et la gestion inefficace. Ceci a mené à une mesure où l’accueil ne serait accordé qu’aux femmes et aux enfants, laissant de côté les hommes adultes seuls. [8] [9]Une telle politique est une menace à la démocratie et à l’état de droit [10] [11]L’État belge a été condamné à plusieurs reprises pour non-respect de ses obligations en matière d'asile, et la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration a déclaré qu’il s’agissait d’une politique délibérée pour faire appliquer des mesures de discriminations des hommes adultes. La Belgique a reçu 148 condamnations en une journée de la part de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour son inertie dans la réception de personnes migrantes, notamment l'insuffisance des hébergements fournis et les conditions de vie précaires [12]. Ces condamnations soulignent le besoin urgent de réformes pour améliorer le système belge d'accueil des personnes migrantes.
[1] Federal Government (2023), National Reform Program: https://commission.europa.eu/document/download/facc7756-eeed-45b8-9f9f-9b7453ddbb6b_en?filename=Belgium_NRP_2023_EN.pdf
[2] European Commission (2023), 2023 Country Report Belgium: https://economy-finance.ec.europa.eu/document/download/f44ddf3f-7b94-4b49-bcbf-2e4f00af9c1b_en?filename=ip225_en.pdf
[3] RTL (2022), Flux migratoires: appel à l'aide des directeurs des centres Fedasil, Flux migratoires: appel à l'aide des directeurs des centres Fedasil: https://www.rtl.be/page-videos/belgique/societe/flux-migratoires-appel-laide-des-directeurs-des-centres-fedasil/2022-10-20/video/495076
[4] Médecins du Monde (2024), La Justice autorise des ONG à saisir les comptes de Fedasil https://medecinsdumonde.be/actualites-publications/actualites/la-justice-autorise-des-ong-a-saisir-les-comptes-de-fedasil#:~:text=La%20Cour%20d'Appel%20de,sur%20les%20comptes%20de%20Fedasil
[5] 7sur7 (2024), Malaise chez Fedasil: Le personnel doit travailler dans des conditions indignes: https://www.7sur7.be/belgique/malaise-chez-fedasil-le-personnel-doit-travailler-dans-des-conditions-indignes~af926658/?referrer=https%3A%2F%2Fwww.bing.com%2F
[6] RTBF (2024), L'intégration des immigrés et de leurs enfants sur le marché du travail reste difficile: https://www.rtbf.be/article/l-integration-des-immigres-et-de-leursenfants-surle-marche-du-travail-reste-difficile-11345684
[7] CEPAG (2010), Etude statistique sur les inégalités à l’emploi en Wallonie: https://www.cepag.be/sites/default/files/publications/inegalites_a_lemploi.pdf
[8] RTL (2023), La Belgique n'accueillera plus les hommes seuls, demandeurs d'asile: "Ce n'est pas vraiment facile mais qu'allons-nous faire?: https://www.rtl.be/actu/belgique/societe/la-belgique-naccueillera-plus-les-hommes-seuls-demandeurs-dasile-ce-nest-pas/2023-09-06/article/584997
[9] TV5MONDE (2023), La Belgique condamnée pour "refus caractérisé" d'héberger un demandeur d'asile: https://information.tv5monde.com/international/la-belgique-condamnee-pour-refus-caracterise-dheberger-un-demandeur-dasile-2658769
[10] Centre Avec (2023), Crise de l’Accueil Des Demandeurs d’Asile : était-elle inévitable?: https://www.centreavec.be/publication/crise-de-laccueil-des-demandeurs-dasile-etait-elle-inevitable/#:~:text=En%20ao%C3%BBt%202023%2C%201.799%20personnes,pas%20plus%20de%206%20mois.
[11] Le Soir (2023), Migration : qu’allons-nous pouvoir dire à nos étudiants?: https://www.lesoir.be/538243/article/2023-09-20/migration-quallons-nous-pouvoir-dire-nos-etudiants
[12] Le Soir (2022), Chaos migratoire: la Belgique condamnée 148 fois par la CEDH en une

Note 39
Conditions de travail équitables
Salaires adéquats
Le GSN signale des écarts de salaires entre les trois régions de Belgique : ils sont effectivement légèrement plus bas en Wallonie, par rapport aux salaires en Flandre et à Bruxelles [1]. Depuis 2021, la forte inflation a poussé à la hausse le coût de la vie et érodé le pouvoir d'achat de la plupart des gens en Belgique [2]. Pour atténuer l'impact de la hausse des prix, le pays utilise un système d’indexation qui ajuste les revenus lorsque l'inflation dépasse un seuil spécifique, pour veiller à ce que les revenus restent en phase avec la hausse du coût de la vie. En novembre 2022, le gouvernement fédéral a proposé de reprendre les négociations salariales bloquées, en préservant l'indexation automatique et les augmentations des barèmes de rémunération, tout en fixant la marge des salaires à 0 % pour 2023 et 2024. La proposition autorise une prime unique fondée sur le rendement allant jusqu’à 750 €, en fonction des profits de l’entreprise, dont les détails doivent être négociés à l’échelle de chaque secteur. Ce plan assure une protection des salaires contre l'inflation mais n’aborde pas pleinement la hausse du coût de la vie, et son efficacité dépend des négociations sectorielles et des performances de l’entrepris [3] .
Malgré ses avantages, le système d’indexation belge est surveillé de près. L’évaluation faite par la Commission européenne du programme de réforme nationale 2023 de la Belgique dans le cadre du semestre européen signale que, même si le système n’a pas provoqué de croissance excessive des salaires récemment, il devient problématique lors des périodes de haute inflation[4] Même si les marges bénéficiaires élevées dans certains secteurs ont permis initialement d'aider à absorber les hausses dans les coûts de main-d'œuvre, ces marges ont baissé de façon irrégulière en 2022. Les augmentations de salaire nominal pourraient potentiellement dépasser celles des pays voisins, en raison de la forte inflation en 2022 et 2023, ce qui rend les entreprises belges moins compétitives mais qui protège le pouvoir d’achat des travailleurs et travailleuses. Même s’il réussit à maintenir les niveaux des salaires, le système d’indexation belge est également une source d’inégalité, car un grand nombre d’individus ne sont pas couvert·e·s par le système ou par d’autres mesures gouvernementales qui atténuent les impacts de l'inflation. En particulier, les personnes travaillant à leur compte et certaines organisations à but non lucratif ne bénéficient pas pleinement de ces ajustements (dépendant de la commission paritaire), l'indexation ne se traduit donc pas toujours en hausses proportionnelles des salaires nets et des revenus disponibles[5] Les disparités dans la sécurité économique et le pouvoir d’achat s’en voient exacerbées.
De cette façon, même si les chiffres de la pauvreté - mesurés par l'indicateur de pauvreté monétaire - restent stables, les groupes les plus vulnérables continuent d’éprouver des difficultés. Les foyers à faibles revenus sont affectés de façon disproportionnée par la hausse des coûts, en particulier ceux de l’énergie et de l’alimentation. Les coûts énergétiques des 25 % des ménages les plus pauvres ont augmenté de 60 points de pourcentage de plus que ceux des 25 % des ménages les plus riches. L'inflation frappe plus durement les ménages les plus pauvres, car une part plus élevée de leurs dépenses totales est destinée aux produits de première nécessité tels que la nourriture, l’électricité, le gaz et le chauffage. L'inflation dans le panier de consommation des personnes qui ne répondent pas aux critères pour bénéficier du tarif social (un tarif réduit pour les coûts d’énergie et du gaz) en raison de conditions administratives mais qui font partie de la population à faibles revenus, a atteint 9,7 % tandis qu'elle n'est que de 7,9 % pour les plus riches[6] Ceci a mené à une augmentation constante du nombre de Belges indiquant qu’il leur devenait compliqué d'arriver en fin de mois, signe d’une généralisation des difficultés économiques, dans la lignée d’une installation durable de la pauvreté. [7]
Bonne pratique
Une convention collective de travail (CCT) est un accord écrit entre syndicats de travailleur·se·s et employeurs ou associations d’employeurs.[8] En Belgique, les CCT sont des instruments fondamentaux qui établissent non seulement les conditions de travail et les relations professionnelles au sein d’un secteur ou d’une entreprise, mais qui veillent également à ce que les salaires et les normes en matière d’emploi soient équitables et cohérents selon les secteurs d'activité. Ces conventions sont négociées dans le cadre des commissions paritaires, des organes spécifiques à chaque secteur où les employeurs et les représentant·e·s des employé·e·s travaillent ensemble à l’obtention d’un consensus.
Les CCT en Belgique ont un caractère juridiquement contraignant et jouent un rôle essentiel dans la protection des droits des travailleurs et des travailleuses, car elles stipulent les conditions telles que les heures de travail, les salaires minimums, les mesures de santé et de sécurité et la stabilité de l'emploi. Souvent, elles incluent des dispositions pour des avantages supplémentaires tels que les congés payés, l’assurance maladie et les retraites, ce qui améliore le bien-être global des employé·e·s. En outre, les CCT garantissent la stabilité des relations professionnelles en favorisant le dialogue continu entre les représentant·e·s des syndicats et les employeurs, ce qui aide à prévenir les conflits et à maintenir un équilibre dans les dynamiques de pouvoir sur le lieu de travail.
[1] Iweps (2024), SALAIRES MENSUELS BRUTS DES SALARIÉS OCCUPÉS À TEMPS PLEIN: https://www.iweps.be/indicateur-statistique/salaires-mensuels-bruts-moyens/#:~:text=En%202021%2C%20le%20salaire%20mensuel
[2] Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale (2023), La dimension financière de la pauvreté: https://luttepauvrete.be/wp-content/uploads/sites/2/2024/01/Rapport-bisannuel-2022-2023-La-dimension-financiere-de-la-pauvrete-FR-.pdf
[3] Federal Government (2023), National Reform Program: https://commission.europa.eu/document/download/facc7756-eeed-45b8-9f9f-9b7453ddbb6b_en?filename=Belgium_NRP_2023_EN.pdf
[4] European Commission (2023), 2023 Country Report – Belgium: https://economy-finance.ec.europa.eu/publications/2023-country-report-belgium_en
[5] Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale (2023), La dimension financière de la pauvreté: https://luttepauvrete.be/wp-content/uploads/sites/2/2024/01/Rapport-bisannuel-2022-2023-La-dimension-financiere-de-la-pauvrete-FR-.pdf
[6] Economie (2024), Tarif social pour l'énergie pour les personnes bénéficiant d’une intervention majorée: https://economie.fgov.be/fr/themes/energie/prix-de-lenergie/tarif-social-pour-lenergie/tarif-social-pour-lenergie#:~:text=31%20d%C3%A9cembre%202022.-,vous%20devenez%20une%20personne%20ayant%20droit%20%C3%A0%20l'intervention%20major%C3%A9e,est%20aussi%20valable%20en%202023
[7] STATBEL (2023), Les Belges ont toujours plus de mal à joindre les deux bouts/ https://statbel.fgov.be/fr/nouvelles/les-belges-ont-toujours-plus-de-mal-joindre-les-deux-bouts
[8] Service Public Fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale (2024), Conventions collectives de travail (CCT): https://emploi.belgique.be/fr/themes/commissions-paritaires-et-conventions-collectives-de-travail-cct/conventions-collectives-de

Note 33
Inclusion et protection sociales
Logement
L’accès à un logement décent demeure un enjeu crucial en Belgique, selon le GSN. Les logements sociaux ne représentent que 6,81 % du parc locatif, ce qui est insuffisant pour répondre à la demande croissante.[1] Bien qu’une légère hausse ait été constatée, elle ne parvient pas à faire face à l’augmentation des logements sur le marché privé ou l’envolée de la demande de logement social, en particulier à Bruxelles [2] [3] Les prix du marché de la propriété et la crise de l’énergie rendent la situation actuelle d’autant plus urgente. On estime qu’il existe 5000 personnes sans-abri rien que dans la région de Bruxelles, et près de 52 000 ménages sont sur liste d’attente pour un logement social ; la demande étant deux fois supérieure à l’offre. [4]En 2023, le gouvernement belge a priorisé le logement avec différentes politiques. Le gouvernement a fait un effort significatif pour rénover le logement social, avec un investissement de 30 millions € et une hausse de 20 % des aides pour les mesures d’efficacité énergétique prises par les associations et les autorités locales.[5] Les mesures en lien avec l’énergie comprenaient notamment la réduction de la TVA sur le gaz et l’électricité, l’extension du tarif social de l’énergie et la proposition d’un décret royal pour aider au remplacement des systèmes de chauffage. Ces initiatives se sont principalement focalisées sur la lutte contre la précarité énergétique et afin de rendre les logements plus abordables.
En même temps, une série d’obstacles ont été identifiés, principalement en Flandre. Des conditions restrictives dans l'attribution de logement social compliquent l'accès aux couches les plus pauvres de la population. D’autres conditions, telles que la connaissance de la langue ou le statut de demandeur·se d’emploi, renforcent les inégalités préexistantes[6] Enfin, un manque structurel de soutien humain et financier aux services publics et aux organisations sociales retarde les procédures de compensation sociale, ce qui complique encore davantage l’obtention d’un logement social. Bien que les conditions et règles d'attribution soient plus strictes et donnent donc lieu à davantage de contrôle et par conséquent moins de discrimination dans le logement social, ces contrôles ont également compliqué l'accès de certaines minorités au logement social, en partie en raison de barrières linguistiques.[7] Tandis que la législation a réduit de façon significative la discrimination institutionnalisée dans le logement social, le secteur privé demeure problématique et constitue la source de 81 % des cas de discrimination (liés au statut financier, à l'appartenance ethnique ou à la situation de handicap).[8] Le nombre de logements étudiants est insuffisant et les loyers ne cessent d’augmenter. L’insécurité financière et la crise de l’énergie poussent de plus en plus de gens à partager un logement, mais le statut juridique de cohabitation est injuste et peut avoir de graves conséquences financières.[9] Les allocations et l’aide sociale se fondent sur le total des revenus du ménage, ce qui a un impact sur les rôles des femmes sur le marché du travail et au sein de la famille, avec le renforcement des inégalités quotidiennes et une réduction de leur indépendance financière.
Bonne pratique
Housing First adopte une approche innovante pour aider les personnes sans-abri les plus vulnérables, qui font souvent face à des problèmes de santé physique ou mentale ou de toxicomanie, à s’intégrer socialement.[10] Unlike traditional methods of integration, which impose numerous conditions and stages, Housing First makes the provision of housing a priority, and there are no requirements beyond those applicable to all tenants. The organisation allocates a support team to accompany the tenant in all aspects of their life to ensure residential stability.
Accès aux soins de santé
a Belgique fait face à d’importants défis en matière daccès à des soins de santé abordables. Le pays affiche des taux parmi les plus hauts de dépenses de santé personnelles catastrophiques (lorsque le reste à charge dépasse les 40 % de la capacité à payer des soins de santé) [11] en Europe de l’Ouest, selon un rapport de 2023 de l’Organisation mondiale de la santé. Les coûts de santé à charge du ou de la bénéficiaire sont si élevés que les ménages concernés ne peuvent souvent pas subvenir à leurs besoins de base tels que la nourriture, le logement et le chauffage.[12]
Les principaux facteurs de ces coûts comprennent les produits médicaux, tels que les lunettes de vue et les appareils auditifs, ainsi que les soins hospitaliers. Les ménages les plus pauvres sont tout particulièrement accablés par les coûts des soins ambulatoires, des médicaments et des examens de diagnostic. Plutôt que de dispenser les soins ambulatoires comme prestation en nature, la Belgique, jusqu’à récemment, remboursait ces soins rétrospectivement, exacerbant la pression financière. Depuis 2022, la plupart des prestataires de soins de santé ont été remboursés directement par les mutuelles des patient·e·s, ceux-ci et celles-ci payant uniquement leur part des frais médicaux au moment du traitement. Toutefois, cet arrangement (appelé tiers payant) est un choix fait par les prestataires de soins. Le gouvernement a fait d’autres efforts comme celui de geler les limites annuelles de la contribution financière du patient ou de la patiente et d’élargir la couverture des soins dentaires, mais de grands obstacles demeurent.
Bien qu’elles aient droit aux soins médicaux et à l'aide médicale d’urgence, les personnes migrantes, réfugiées et demandeuses d’asile rencontrent des difficultés dans l'accès aux soins de santé.[13] Parmi ces difficultés, on retrouve la complexité du système de santé belge et la dématérialisation croissante des services. Des obstacles tels que le manque de financements et d’informations, la crainte d’une arrestation, la barrière de la langue et des procédures administratives complexes, peuvent entraîner des retards et le renoncement à l’aide médicale.[14] [15] En outre, une dépendance grandissante aux services en ligne peut mener à l'exclusion de ceux et celles qui n’ont pas les compétences numériques nécessaires, limitant alors l'accès aux informations et services essentiels de santé. Malgré les recommandations de l’Union européenne de promouvoir l'intégration des ressortissant·e·s de pays tiers, la Belgique peine à harmoniser ses politiques et à allouer les ressources suffisantes pour garantir un accès équitable des personnes migrantes aux soins de santé. Un manque de volonté politique a créé des lacunes dans la mise en œuvre de politiques inclusives et efficaces. [16]
[1] Le soir (2024), En 20 ans, le nombre de logements sociaux a moins vite progressé que le marché privé: https://www.lesoir.be/567753/article/2024-02-12/en-20-ansle-nombre-de-logements-sociaux-moins-vite-progresse-que-le-marche
[2] Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale (2016), Des faits et des chiffres: logements sociaux: https://luttepauvrete.be/des-faits-et-des-chiffres/des-faits-et-des-chiffres-logements-sociaux/
[3] La RTBF (2024), Nous avons cinq demandes par jour : les demandes pour les logements sociaux explosent dans certaines communes: https://www.rtbf.be/article/nousavons-cinq-demandes-par-jour-les-demandes-pour-les-logements-sociaux-explosent-danscertaines-communes-11205750
[4] JOC (2024), Crise du logement ou crise de l’accès au logement: https://joc.be/crise-du-logement-ou-crise-de-lacces-au-logement/
[5] Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale (2023), La dimension financière de la pauvreté: https://luttepauvrete.be/des-faits-et-des-chiffres/
[6] SPF sécurité sociale (2022), Le non-recours à l'aide sociale en Belgique : propositions politiques, Fin du projet BELMOD: https://socialsecurity.belgium.be/sites/default/files/content/docs/fr/publications/belmod-rapport-final-fr.pdf
[7] Erasmus Hogeschool Brussel – SteR Stedenbouw en Ruimtelijke Planning (2010), Diversité et discrimination dans le logement social: pour une approche critique de la «mixité sociale: https://www.unia.be/files/Documenten/Publicaties_docs/Mixite_FR_DEF.pdf
[8] Walloon Government (2024), Stop à la discrimination dans l’accès au logement: https://www.wallonie.be/fr/actualites/stop-la-discrimination-dans-lacces-au-logement
[9] FGTB (2023), Abolissons le statut de cohabitant: https://fgtb.be/abolissons-le-statut-de-cohabitant
[10] Service public de programmation Intégration sociale (SPP IS) (2024), Housing First Belgium: https://www.mi-is.be/fr/themes/lutter-contre-le-sans-abrisme-et-labsence-de-chez-soi/housing-first-belgium
[11] WHO (2023), Households with out-of-pocket payments greater than 40% of capacity to pay for healthcare: https://www.who.int/data/gho/indicator-metadata-registry/imr-details/4989
[12] WHO (2023), Can people afford to pay for health care? New evidence on financial protection in Belgium: https://www.who.int/europe/publications/i/item/9789289058599
[13] Bruxelles-J (2024), Qui a droit à l’Aide Médicale Urgente (AMU)?: https://www.bruxelles-j.be/droits-sociaux/obtenir-de-laide-du-cpas/comment-le-cpas-peut-il-aider-les-personnes-qui-sont-en-sejour-illegal-en-belgique-les-sans-papiers/
[14] Médecins du Monde (YEAR), Aux côtés des migrant·e·s en Belgique », Aux côtés des migrant·e·s en Belgique: https://medecinsdumonde.be/regions/belgique
[15] European Social Observatory (2020), Les inégalités d'accès aux soins de santé en Belgique: https://www.ose.be/sites/default/files/publications/2020_SC_RB_NIHDI-Report_Synthese_FR_1.pdf
[16] Centre Avec (2023), Crise de l’Accueil Des Demandeurs d’Asile : était-elle inévitable?: https://www.centreavec.be/publication/crise-de-laccueil-des-demandeurs-dasile-etait-elle-inevitable/#:~:text=En%20ao%C3%BBt%202023%2C%201.799%20personnes,pas%20plus%20de%206%20mois.

Note 42
Espace civique
Un espace favorable à la société civile
Le CIVICUS Monitor classe l’espace civique de la Belgique comme « rétréci », un statut qui n’a pas changé depuis 2021.[1] Cette classification indique que même si les individus et les organisations de la société civile peuvent exercer leurs droits à la liberté d’association, de rassemblement pacifique et d'expression, ces droits sont souvent violés par le harcèlement, les arrestations ou les agressions à l’encontre des opposant·e·s aux personnes au pouvoir, ainsi que par l’usage de la force excessive lors des manifestations et la pression politique sur les médias. Le classement est un recul, car la Belgique était qualifiée d’« ouverte » deux années auparavant, ce qui indique un léger déclin dans l’ouverture de l’espace public. La forte culture associative belge est soutenue par deux grandes lois, selon le GSN. La loi du 24 mai 1921 garantit la liberté d’association et celle du 27 juin 1921 accorde l’état civil aux associations sans but lucratif (ASBL) et aux établissements d’utilité publique, ce qui leur permet de fonctionner comme entités juridiques indépendantes, avec protection juridique. Aujourd’hui, la liberté d’association en Belgique est largement acceptée et respectée. Les associations belges peuvent être critiques des autorités publiques même lorsqu’elles dépendent d’elles pour les financements publics, ce qui illustre une liberté d'expression essentielle au maintien des valeurs démocratiques.[2]
Toutefois, les libertés ne sont jamais immuables et requièrent une vigilance constante. Des changements apportés à certains aspects des lois en vertu desquelles les associations fonctionnent les ont affaiblies et rendues plus vulnérables. Depuis janvier 2024, les associations et les entreprises en Belgique sont régies par le même cadre juridique, le Code des sociétés et des associations (CSA). Les associations doivent désormais aligner leurs statuts sur le CSA, ce qui leur permet, sous certaines conditions, d’avoir des activités commerciales comme principal objectif. Cette fusion des statuts risque de porter atteinte à l'essence même des associations sans but lucratif (ASBL), qui est l'engagement de leurs membres envers le bien commun. Ceci est un reflet de l'influence grandissante du néolibéralisme sur le secteur associatif et pourrait avoir des impacts sur la gouvernance des ASBL. De plus, les exigences du CSA pourraient donner naissance à d’importants fardeaux administratifs, en particulier pour les petites entités et les bénévoles. La tendance à délégitimer l'action associative ne se limite pas à cette nouvelle législation mais fait partie d’un processus plus vaste de marchandisation du secteur non marchand.[3] Une autre inquiétude provient de l’abandon des subventions structurelles, remplacées par des financements limités dans le temps et conditionnés à un projet. La stabilité fournie par les subventions permettait aux organisations de planifier sur le long terme et de maintenir leurs activités essentielles alors que le nouveau système force les associations à développer constamment de nouveaux projets pour s’assurer d’un financement. Ceci pourrait les mener à s’écarter de leur mission originale et à la dispersion des ressources. Candidater à et assurer la gestion du financement des projets est chronophage et requiert des compétences spécifiques de rédaction de proposition. Cela devient un problème majeur dans le cas des petites associations ayant des moyens limités. Cette dépendance grandissante aux financements en fonction du projet rend également les associations plus vulnérables aux changements politiques et accroît leur instabilité financière.
[1] CIVICUS (2023), Belgium: https://monitor.civicus.org/country/belgium/
[2] Culture.Be, Fédération Wallonie-Bruxelles (2024), Dossier « Centenaire de la loi sur les ASBL : histoire et mutations: https://www.culture.be/activites/fete-de-la-fwb/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=727fdbf0ab29384d2bbe34caa9086a861225a490&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/images/Focus_2021/Focus2021_Centenaire_Loi_ASBL.pdf
[3] Culture.Be, Fédération Wallonie-Bruxelles (2024), Dossier « Centenaire de la loi sur les ASBL : histoire et mutations: https://www.culture.be/activites/fete-de-la-fwb/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=727fdbf0ab29384d2bbe34caa9086a861225a490&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/images/Focus_2021/Focus2021_Centenaire_Loi_ASBL.pdf

Score 50
Transition verte socialement juste
Accès à l’énergie et précarité énergétique
En Belgique, l’accès à l’énergie est en déclin en général et la précarité énergétique est en hausse, selon le GSN. La crise de l’énergie a entraîné une augmentation des factures d’énergie, aggravant le risque de surendettement et les difficultés financières de nombres de ménages vulnérables à Bruxelles.[1] La précarité énergétique en Belgique est étroitement liée à la pauvreté de revenus : 47,2 % des ménages souffrant de précarité énergétique sont également à risque de pauvreté. C’est là une manifestation claire des dimensions multiples de la précarité énergétique et de la nécessité d’approches intégrales pour soutenir les ménages vulnérables.[2]
En 2023, la Belgique a pris des mesures pour lutter contre la précarité énergétique, en augmentant les aides et subventions pour les ménages à faibles revenus et à revenus moyens. Ces mesures exceptionnelles ont été élaborées pour répondre aux nécessités sociales émanant des prix de l’énergie toujours plus hauts et pour fournir des fonds pour garantir la continuité des projets entamés avec le soutien régional. Parmi les mesures on retrouve des initiatives exceptionnelles pour répondre aux nécessités sociales émanant des prix de l’énergie toujours plus hauts, soutenir les ménages les plus vulnérables, et pour garantir qu’ils puissent maintenir une chaleur adéquate dans leur foyer.[3] [4] Outre ces problèmes, il convient de souligner l'accessibilité croissante à l’énergie verte. L’énergie verte a supplanté les énergies fossiles comme source d’électricité en Belgique, même si le nucléaire reste la principale source. Cette croissance est imputable à l’augmentation des investissements dans l’énergie éolienne, tant terrestre qu’offshore, et dans les panneaux solaires, encouragés par la hausse des prix de l’énergie.[5] Cette transition vers des sources durables protège les consommateurs et les consommatrices des fluctuations de prix et promeut un avenir fait d’énergies plus résilientes et respectueuses de l'environnement.
[1] Federal Government (2023), National Reform Program: https://commission.europa.eu/document/download/facc7756-eeed-45b8-9f9f-9b7453ddbb6b_en?filename=Belgium_NRP_2023_EN.pdf
[2] Fondation Roi Baudouin (2023), Baromètre de la précarité énergétique : Analyse et interprétation des résultats 2021: https://media.kbs-frb.be/fr/media/10490/Barom%C3%A8tre%20Pr%C3%A9carit%C3%A9%20Energ%C3%A9tiqu
[3] Federal Government (2023), National Reform Program: https://commission.europa.eu/document/download/facc7756-eeed-45b8-9f9f-9b7453ddbb6b_en?filename=Belgium_NRP_2023_EN.pdf
[4] European Commission (2023), 2023 Country Report – Belgium: https://economie.fgov.be/fr/themes/energie/prix-de-lenergie/tarif-social-pour-lenergie/tarif-social-pour-lenergie#:~:text=31%20d%C3%A9cembre%202022.-,vous%20devenez%20une%20personne%20ayant%20droit%20%C3%A0%20l'intervention%20major%C3%A9e,est%20aussi%20valable%20en%202023
[5] RTBF (2024), Production d’électricité en 2023 : le nucléaire reste numéro 1 mais les énergies renouvelables dépassent les énergies fossiles: https://www.rtbf.be/article/production-d-electricite-en-2023-le-nucleaire-reste-n-1-mais-lesenergies-renouvelables-depassent-les-energies-fossiles-11307464